Non, ceci n'est pas à propos des grandes maisons de Bob, riche depuis longtemps, qui, immenses planchers obligent, possède peut-être 70 balais.
70 ans donc le Bob. Et quel artiste ! Un hénaurme bloc de granit dans le paysage du message, de la chanson, de l'influence. Un acrobate des mots comme le sont souvent les gémeaux (McCartney et Joni Mitchell par exemple), une source jamais tarie mais jamais la même. Et le refus permanent de se laisser enfermer dans un style. De la guitare électrique quand ses fans considère la chose comme un sacrilège. De l'héroine quand les biens pensants à qui il commençait à plaire l'aurait présenté à leurs filles. Des textes éclatés alors qu'on lui érigeait déjà la statue du roi de la chanson à message. Des bijoux, combien nombreux, méconnus.
Pour moi Dylan dans toute sa splendeur, c'est pas autant "Like a Rolling Stone" que l'extraordinaire "Desolation Row" ou "Lily, Rosemary and the Jack of Heart", et leurs personnages déjantés. Le type sait comment raconter une histoire. Tout son imaginaire délinquant est là. Encore aujourd'hui, Desolation Row est un remède pour moi. Littéralement. L'ombre pâle de la déprime passe en nuage au-dessus de moi ? Trois fois en boucle dans mes oreilles la Desolation Row, et le solide est revenu. C'est comme voir les premiers canards revenir du sud en mars, mais en plus condensé. Cinderella, Romeo, Jesus, le bossu de Notre-Dame, Cain et Abel, Einstein, Ophélie, le Bon Samaritain... ils sont tous là. C'est le Cirque du Soleil avant le temps. Et cet harmonica sèche, comme dans un western de Sergio Leone, qui vient percer les tympans, juste ce qu'il faut, vers la fin du rêve. Dans un art où il est de mise de raconter des histoires dans une grande économie de mots, Dylan décide d'écrire des histoires mais de laisser tomber l'économie de mots. Et puis, pourquoi faire dans le genre torturé quand on peut garder son temps pour autre chose ? Il écrit vite. "Blowing in the wind" en 10 minutes par exemple.
De temps en temps, quand la dérive dure un peu trop, il se recentre, le temps d'un coup de poing dans la mare tranquille de l'industrie propre de la musique. À 60 ans, alors que tout le monde le pense fini, il remporte aux Music Awards, parmi 3 ou 4 jeunots dans la vingtaine, l'album de l'année avec le superbe opus: Time Out of Mind. Jamais il n'a eu une plus belle voix depuis ses débuts, parce qu'elle s'est épaissie, enrichie. Comme si Cohen lui avait rendu visite le temps d'un album.
"Everybody is making love or else expecting rain..."
Il y a eu les bombes atomiques; Beatles, Pink Floyd, Elvis. Il y a eu toute une Galaxie de comètes, vives mais bien courtes lueurs. Mais celui qui va laisser le trou le plus profond quand il va partir, c'est le Sieur Dylan.
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