Zola et Hugo et Dumas ne se sont jamais présentés. J'ai quand même disserté un brin sur le fait.
Dernièrement, une amie m'a rappelé cette courte écriture rythmique. Ma douleur automobilesque. Mon drame permanent sur 4 roues. Ne suis-je fait que pour la légèreté du nuage ? Qu'en est-il de la possibilité de me mouvoir dans boîte tôlée et pneus gonflés sans drame ? Cette option m'est-elle refusée pour toujours ? Dieu... Dieu... si Tu existes... es-ce là mon destin ?
Bon bon, on se calme. Allez Anges et Musique des Sphères, mains aux harpes et voix aux cieux. Pardonnez la jeunesse du texte, le temps passe...Voici donc:
MES VÉHICULES (poème en 5 épreuves)
Mon premier tout blanc, Toyota de splendeur
Boîte à savon discrète, enrhumée du moteur
Plus le genre taxi de brousse que Mercedes DS
N'a mis que deux semaines pour se blesser une fesse
Eh oui, premier juillet, jour de déménagement
Tant qu'à m'laisser tomber, elle choisit son moment
Parfois presqu'une voiture, aux airs préhistoriques
Ce porte-appareil pour cassettes huit pistes
Dont le ruban tordu souvent restait au fond
Je le salue quand même ce petit rien nippon
Puis Dieu qui, au fond, aime bien ses enfants
Dit; "Maintenant une neuve, pause de tourments".
Et la Honda Civic apparut dans ma vie
Au prix de l'effacement de mes économies
Une quatre cylindres roulant comme une deux et trois quart
Et dont la tôle vibrait quand il ventait trop fort
On l'aurait égaré dans une peau de mouton
Mais pour trois sous d'essence aurait rejoint Pluton
Enfin, karma oblige, par une belle matinée
Un samedi de mai, je m'la suis fait voler
Avais-je eu ma leçon? Non, car je suis retourné
Pour le meilleur ou le pire au ciel des usagées
Mais du petit, du léger, du fragile...plus jamais!
Maintenant je paraderais dans un gros Chevrolet
Un char d'assaut messieurs-dames, un géant cosmique
De la place à l'avant pour deux Honda Civic
Ne passait pas où des autobus en doublaient d'autres
C'était un roi d'acier, un noble aux pneus chauves
J'ai usé des souliers juste à me rendre aux portes arrières
Et pour le faire rouler, presqu'asséché des pétrolières
Puis, triste souvenir, l'expérience de la rouille
D'une "chose" se déplaçant avec la grâce d'une poule
Nymphette des camionnettes, gruyère des véhicules
Elle fut quand même utile, un peu comme une mule
Rossinante fatiguée au capot papillon
C'était bien davantage aventure que camion
Pas moyen d'écouter la musique sans clins-clins
Pas plus sûr de pouvoir ouvrir les portes demain
Et pour finir ta vie, petite enfant fragile
Sur un traversier tu laissa toute ton huile
Arrive le moment où l'on dit: "C'est assez!"
Je mérite dans le confort de me déplacer
Pas de rouille, en ordre, bas kilométrage
Une belle grosse auto rouge avec un passé sage
Les semaines glissent, agréables, sans soucis
Aurais-je enfin trouvé la mécanique bénie?
Bien sûr, les contraventions, une dizaine
Et dans cet hiver rude, immobile une semaine
Alors, malgré les aléas, la paix de l'âme enfin?
Eh non car un matin, on déroba mon bien
Et se déroule ainsi le ruban de ma vie
Solide presque partout, troué en mécanique
De cette série comique aujourd'hui j'en suis là
Quand je dis j'en suis là, je veux dire j'en suis las
Peut-être un jour lointain, quand mes verres seront loupes
Quand il sera commun d'avoir sa soucoupe
J'étonnerai les gens, tous ceux qui m'ont connu
En épique combat, Don Quichotte des rues
Et pointant, déjà vieille, la source de mon transport
S'écrieront ébahis: "Quoi? Tu l'as encore?"
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